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Les élèves et les enseignantes et enseignants ne sont pas des cobayes!

| Droits des travailleurs et travailleuses, Syndicalisation

Shelley L. Morse

Pour bien des gens d’un bout à l’autre du pays, aujourd’hui marque la fin de la septième semaine de cette crise sanitaire et économique. Sept semaines loin de la famille, des amies et amis, et, pour la majorité des Canadiennes et Canadiens, du milieu de travail. L’impact émotionnel et financier que cette crise a sur la population est difficile à saisir, et on ne sait trop quelle allure prendra le retour à la normalité. 

Évidemment, nous attendons tous et toutes avec impatience de pouvoir nous réunir et nous déplacer plus librement, mais pas au point de le faire au détriment de la santé et de la sécurité. C’est pourquoi la décision qu’a prise le gouvernement du Québec, dans son empressement à relancer l’économie, de rouvrir les écoles primaires a causé une onde de choc dans toute la province. En effet, cette décision place les enfants, les enseignantes et enseignants, et les autres professionnelles et professionnels de l’éducation directement dans l’œil du cyclone. 

Le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur a fait un pari très risqué en faveur de la relance d’une économie paralysée, mais c’est un pari qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices, surtout quand on a comme adversaire un virus qui se multiplie au gré des contacts et qui n’a que faire de notre désir de nous débarrasser de lui. 

Depuis qu’il a annoncé le 27 avril dernier que les écoles primaires rouvriraient le 11 mai dans toute la province et le 19 mai dans la région métropolitaine de Montréal, le Ministère est resté silencieux sur la façon dont les écoles devaient se préparer pour ce retour périlleux à l’école. L’Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec, une organisation membre de la CTF/FCE, a tenté à maintes reprises de communiquer avec des responsables du Ministère pour obtenir des éclaircissements, mais la plupart de ses appels sont restés sans réponse. 

La mise en pause de notre société telle que nous la connaissions avait pour but de protéger les personnes les plus vulnérables. Et l’objectif d’aplanissement de la courbe des infections n’était atteignable qu’avec l’éloignement social. Nous voyons maintenant que notre effort collectif porte fruit. Les taux d’infection déclinent et les hôpitaux sont en mesure de soigner les personnes les plus gravement malades. Mais cette situation ne sera soutenable que si nous demeurons vigilants.  

L’interruption de l’année scolaire a été soudaine et elle s’est produite à un moment où les élèves soit se préparaient à partir pour le congé de mars ou à en revenir. Les fermetures ont laissé les familles et les tuteurs et tutrices dans l’obligation de trouver rapidement des solutions. Et la situation continue d’être difficile pour eux tandis qu’ils doivent s’occuper de leur travail, des enfants et des problèmes financiers qui viennent s’ajouter à tout le reste. Malgré cela, il est impossible de rouvrir les écoles primaires en toute sécurité, même en limitant à 15 le nombre d’élèves par classe. Quand on connaît les enfants, on sait qu’il est complètement illusoire de penser qu’on pourra leur faire observer l’éloignement physique recommandé.  

Imposer cela au personnel de l’éducation et créer une situation où les enfants doivent assumer le fardeau du risque et devenir les cobayes de nos expériences est non seulement éthiquement incorrect, mais dangereux. Les écoles offrent déjà un terreau fertile aux virus de la grippe et du rhume, qu’arrivera-t-il quand toutes ces personnes, les élèves, le personnel des écoles, les parents, retourneront à la maison porteuses de cette nouvelle menace invisible? Ouvrir les écoles primaires, c’est mettre en péril les avancées de nos municipalités et de toute la société. Nous ne voulons pas effacer des progrès qui ont pris des mois à réaliser, comme si les efforts herculéens de nos travailleurs et travailleuses de première ligne n’en avaient pas valu la peine et comme si les décès de ceux et celles qui ont succombé à la COVID-19 avaient été en vain.  

Le moment viendra où la vie reprendra lentement ses droits, où les magasins et les restaurants ouvriront leurs portes, où les parcs seront de nouveau des lieux de vie et où les classes se rempliront du bruit joyeux des élèves. Mais en attendant, nous devons surveiller ce virus et poursuivre notre sacrifice collectif pour la bonne santé des autres.  

Disons-le tout simplement, en ce moment, une école sûre est une école fermée. 

Renseignements généraux

Shelley L. Morse est la présidente de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (CTF/FCE), la voix nationale de la profession enseignante. Alliance nationale d’organisations provinciales et territoriales, la CTF/FCE représente plus de 300 000 enseignantes et enseignants des écoles élémentaires et secondaires au Canada. Elle est également membre de l’Internationale de l’Éducation, la fédération mondiale d’organisations nationales de l’enseignement réparties dans 173 pays.

Contact avec les médias

Andrew King
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